LA PENSEE INITIATIQUE - 2

Un article précédent disait que le développement du bébé dans le ventre de la mère était la plus belle métaphore de l'initiation. On peut se demander alors comment dans notre vie humaine en dehors du ventre maternel on pouvait continuer cette évolution de façon exponentielle, car le sociétés, les cultures, les éducations nous empêchent généralement de le faire. Un individu nouveau, novateur, est le travail des siècles. Alors on comparait toujours dans cet article l'histoire de l'évolution des animaux et du bébé. Le bébé est d'abord une cellule unique, puis se divise, pour se multiplier à l'infini, après 9 mois il y a des centaines de milliards de cellules, chacune spécialisée (coeur, foie, estomac, neurones...). Pour croître il est passé par une morphologie, une forme de poisson, de reptile, de mammifère, puis d'humain; exactement comme l'histoire de l'évolution animale. C'est la même chose pour l'apparition de la vie sur terre; d'abord des cellules sont nées dans la mer (comme le bébé dans la mère), forment des agglomérations puis se développent sur des milliards d'années jusqu'aux humains et aux sociétés. Oui la mer est notre mère. Une de nos mères en tout cas.

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Maintenant voilà: dans les initiations, on parle de continuer cette évolution exponentielle dans nos vies quotidiennes. Les initiations veulent accélérer le processus universel qui fait que la conscience entre en expansion (l'univers est en expansion, le cerveau est en expansion). Si je prends l'exemple de l'alchimie, les mots empruntés sont spéciaux, bien que le but de toute initiation soit le même: ne pas ralentir notre croissance, mais trouver des moyens de l'accélérer. En alchimie on parle de trouver l'or. C'est évidemment une métaphore, l'or c'est la lumière (Orient: or-riant, le lieu où la lumière nous sourit ; occident: le lieu où la lumière est occidée, elle meurt). L'union mystique avec le tout est le but de l'alchimie: je suis en chaque chose et chaque chose est en moi. Pour ça il faut retrouver la parcelle divine de lumière cachée au fond la matière. On parle de spiritualiser la matière et de matérialiser l'esprit. Sa formule intellectuelle serait la question: "Regarde un peu, observe autour de toi: la matière est-elle lumineuse, ou la lumière est-elle matérielle?" Quand on ne peut plus y répondre l'illumination est proche. D'ailleurs on ne se la pose même plus. Bref, comme initiation l'alchimie nous mènerait donc à une re-naissance, pour arriver à la co-naissance, naître avec le monde dont nous faisons partie, car qui se transmute transmute le monde (pour le Bouddha illuminé, tout est bouddha). Alors ce passage (pas sage ; passe-âge, c'est vu comme pas sage mais on passe d'un âge à un autre, pas forcément en étant adulte ou vieillard, mais en refaisant l'expérience de l'embryon pour renaître); ce passage est donc une naissance, hors quand le bébé naît il passe de l'eau à l'air : mais aussi de l'obscurité à la lumière. Je le dis car j'en ai fait l'expérience, et toi aussi. C'est pareil quand les poissons sont sortis de l'océan pour aller sur la terre ferme, les amphibiens; ils ont habitué leurs branchies à l'air de l'atmosphère et non à l'air de l'eau. Ils sont passés de l'eau à l'air, en ré-expérimentant à notre façon cette naissance. En alchimie alors on dit qu'on doit trouver l'or, pourquoi? Parce que d'une certaine façon c'est répéter ce processus : OR s'écrit O-R ce qui se prononce eau-air, passer de l'eau à l'air. Bien sûr les raisons peuvent être multiples, mais aujourd'hui je parle de celle là. Concrètement si on peut faire des initiations (sans gourou, sans prêtre, imam, sans personnages irresponsables...) il faut répéter ce mouvement de re-naissance. Ce que je dis est pas idéaliste, car tout le monde le fait sans en être forcément conscient. Quand j'éteins la lumière le soir pour me coucher, je fais le chemin inverse, je retourne dans l'obscurité du ventre maternel pour rêver, parfois même en position foetale. Car dream = madre = drame, le rêve nous ramène à la mère pour qu'on perçoive notre drame intérieur. Les yeux fermés n'existent pas, les paupières fermées oui mais l'oeil se retourne vers l'univers intérieur, qui est aussi vaste et aussi expansif que le cosmos. Donc on fait ce mouvement tous les soirs et tous les matins c'est une re-naissance, on part du rêve pour aller à la lumière (lumière extérieure cette fois-ci). Mais c'est pareil quand on va au cinéma, car le confort de cette chambre obscure et ce bercement et cette hypnose est similaire à la caverne intra-utérine. Quand on sort de la salle on renaît. Malheureusement ce que je dis là est vrai quand on va fouiner les textes de l'histoire anthropologique et la psychologie, en ce qui concerne les origines du cinéma ; mais c'est faux, quand je sors d'une salle de ciné je me sens pas du tout renaître, mais ça c'est à cause de la maladie de notre époque. Par contre le mouvement est le même: une re-naissance qui va de paire avec une re-co-naissance.

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Moi je pense pour mon cas qu'on peut re-créer des initiations grâce au théâtre, au cinéma, ou à la musique (live-concerts). Quand on regarde l'histoire de l'art aux plus anciennes traces, on voit que l'art n'était pas séparé de l'initiation. Ce qu'on appelle le "chamanisme" serait donc non seulement à la base de la science, mais aussi de la religion et de l'art. Car le chamanisme est le mixe originel des 3, qui prend l'homme dans toute sa complexité (toutes ses dimensions). J'ai dans mon imagination sans cesse des images d'initiations massives dans des cinémas, des théâtres, ou des parcs. Je sens qu'au XXI ème siècle on aura des nouvelles initiations, on en a trop besoin pour laisser cette partie de nous ne pas s'exprimer et la refouler pour y préférer notre art industriel qui n'a pas pour but d'être utile et bénéfique pour celui qui le reçoit, mais qui préfère le garder dans une atmosphère mentale infantile de consommateur frustré.